RESTRUCTURATION DU SECTEUR HOSPITALIER DANS LE FINISTÈRE
M. Jean-Jacques Urvoas – Mise en œuvre de manière brutale et
sans concertation avec les personnels des établissements concernés et
les collectivités territoriales, la restructuration du secteur
hospitalier dans le Finistère suscite un mouvement de colère de grande
ampleur : les principales artères routières du département sont
bloquées, les centres-villes – notamment à Quimper et à Châteaulin –
investis par des foules de manifestants.
Ce mouvement d'exaspération, soutenu par l’ensemble des Bretons, ne
se comprend que trop bien. Les Finistériens, et notamment les
Cornouaillais, peuvent légitimement nourrir des doutes quant à la
volonté du Gouvernement de maintenir un service public de santé
performant dans le département. Transfert des allogreffes et de la
neurochirurgie pédiatriques de Brest à Rennes, fermeture envisagée de
la maternité et du service de chirurgie de l'hôpital de Carhaix en
septembre, fermeture des urgences de nuit à Concarneau, sans compter
les menaces qui pèsent sur celles de Pont-l'Abbé, inquiétudes quant à
l'avenir des hôpitaux de Landerneau, de Quimperlé et de Douarnenez :
voilà qui ressemble fort à une entreprise d’agression contre
l’équilibre sanitaire de nos territoires, d’autant plus mal perçue que
les décisions qui l'accompagnent vont souvent à l’encontre des
engagements pris par les pouvoirs publics. C'est ainsi, par exemple,
que le schéma régional d'organisation sanitaire établi en 2006
garantissait le maintien des services actifs de l'hôpital de Carhaix
jusqu'en 2010 « en raison de l'éloignement de plus de 45 minutes du
plateau technique le plus proche ». Le climat de confiance qui devrait
régir les rapports entre l'État et les territoires est donc bien altéré.
Des voix de plus en plus nombreuses dénoncent la mise en place d'un
système hospitalier où deux ou trois établissements deviendraient des
structures pivots concentrant notamment les urgences, le reste du
département étant peu ou prou transformé en désert médical.
Il importe donc de rétablir le fil d'un dialogue interrompu. Dans
cette perspective, Bernard Poignant, maire de Quimper, vous a écrit le
28 mai pour vous dire qu'il conditionnait sa candidature à la
présidence du Centre hospitalier intercommunal à la réponse que vous
lui donnerez sur vos intentions en matière d'offre de soins en
Cornouaille. Je vous demande à mon tour de les préciser.
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative –
Les recompositions hospitalières dans le Finistère sont avant tout des
évolutions nécessaires. Je ne suis en effet mue que par un seul
objectif : la qualité des soins.
Vous m'interpellez sur trois problèmes qui appellent des réponses distinctes.
La décision de transférer les activités du service des allogreffes
et de la neurochirurgie pédiatrique du CHU de Brest vers ceux de Rennes
et de Nantes était nécessaire pour assurer la qualité de la prise en
charge, comme l'a indiqué l'Agence de biomédecine dans deux avis : l’an
dernier, il n’y a eu qu’un seul cas ! Des associations de parents ont
souhaité le maintien des allogreffes pédiatriques au CHU de Brest. Je
les ai reçues et j’ai engagé une large concertation avec les directeurs
des centres hospitaliers et des agences régionales de l'hospitalisation
de Bretagne et des Pays de la Loire.
L'allogreffe proprement dite sera pratiquée au centre hospitalier de
Rennes, avec des durées d'hospitalisation réduites par un retour
précoce au CHU de Brest.
J'ai demandé au directeur de l'ARH de Bretagne de suivre
attentivement la mise en œuvre de ce dispositif. Je veillerai en outre
à son évaluation régulière. Il faut que chaque cas puisse être suivi le
mieux possible, que le déplacement des parents soit pris en charge et
leur hébergement assuré. Il n’y a là aucune mesure d’économie : il ne
s’agit que de qualité des soins ! Quel ministre de la santé pourrait
raisonner autrement ?
Vous avez également appelé mon attention sur la fermeture envisagée
de la maternité et du service de chirurgie de l'hôpital de Carhaix. Là
encore, il ne s’agit nullement d’une décision de principe : un rapport
consacré à cet établissement a dénoncé une situation accablante et des
difficultés de recrutement qui ont conduit à des difficultés
budgétaires. Quelle ministre de la santé serais-je si je ne considérais
pas qu'il soit urgent de faire évoluer l'hôpital en transformant sa
maternité, en arrêtant une partie de l’activité de chirurgie et en
développant d'autres activités ? Dans un esprit d'ouverture et pour
tenir compte de l'intérêt de la population, j'ai proposé le 13 juin la
réouverture de l'activité ambulatoire de chirurgie. Mon plan pour
l’hôpital de Carhaix n’est pas un plan d’économies, mais un plan de
développement des activités ! Le plus grand danger serait de ne rien
faire.
J’en viens à la fermeture des activités d'urgences de nuit à
Concarneau et à Pont-l’Abbé, qui s’inscrit dans le débat sur la
réorganisation des urgences dans le Finistère. Le SROS adopté en 2006
fait état d'un net déséquilibre de la répartition des services mobiles
d'urgence et de réanimation dans ce département. En effet, le bon sens
veut que les SMUR soient également répartis. Or, dans le Finistère, il
y en a six dans le nord et deux dans le sud. L’agence régionale de
l’hospitalisation a confié une mission d’expertise au SAMU de France
sur la réorganisation des services d’urgence. Cette mission a proposé
la fermeture, la nuit, de services à faible activité et plateau
technique limité, tels ceux de Concarneau et Pont-l’Abbé ; en
contrepartie, le renforcement du service de Quimper par une équipe
supplémentaire permettra de faire face dans de bonnes conditions aux
besoins de l’ensemble de la zone en saison touristique. Une large
concertation a eu lieu et le préfet organisera très prochainement une
table ronde avec les élus, les représentants de l’hôpital et des
libéraux, ainsi que les syndicats, sur l’organisation des soins dans le
département.
Je le répète, je suis la ministre de la qualité des soins, et donc
de la sécurité des patients, car ces deux notions sont indissociables.
Les restructurations que je propose n’ont qu’un seul objectif, assurer
cette sécurité.
M. Jean Jacques Urvoas – Je vous remercie, madame la
ministre, d’être venue répondre aussi complètement à cette question,
car votre parole manquait. Sur place, des manifestations ont lieu
chaque semaine. Samedi dernier, des élus, ceints de leur écharpe, ont
été molestés par les forces de l’ordre. Une autre est prévue samedi
prochain, dans un climat tendu. Le préfet va organiser une table
ronde : je vous invite à y participer car vos propositions n’ont pas
l’assentiment de la population.
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